Skieur Magazine

/ DOSSIER: OSEZ LA FREERANDO

LE NOUVEAU CASSE-TÊTE !

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MONTER POUR MIEUX DESCENDRE

DOMAINE DONT L’ÉLECTROCAR­DIOGRAMME PLAT LAISSAIT À PENSER QU’IL N’Y AVAIT PLUS GRAND-CHOSE À FAIRE POUR SAUVER LE PATIENT, LE MONDE DE LA FIXATION A CHANGÉ DE PARADIGME EN SORTANT DU PACKAGE SKIS-FIXATIONS À TOUT PRIX. À CE JEU, C’EST MARKER QUI A PRIS UNE LONGUEUR D’AVANCE AVEC LA DUKE PUIS LA BARON, INNOVANT CHAQUE ANNÉE DAVANTAGE POUR INITIER LE BESOIN (ET L’ENVIE!) CHEZ LES PRATIQUANT­S QUI SE RETROUVAIE­NT SANS LE SAVOIR À LA RECHERCHE DES RÉPONSES APPORTÉES PAR CES CONCEPTS DÉBRAYABLE­S OU CELUI ENCORE PLUS IMPROBABLE DE LA SCHIZO. CES EFFORTS N’ONT PAS ÉTÉ VAINS PUISQUE MARKER EN A PROFITÉ, SELON NOS ESTIMATION­S, POUR REPRENDRE LE LEADERSHIP MONDIAL DANS LE DOMAINE AVEC UNE PRODUCTION QUI DÉPASSE LE MILLION DE PIÈCES CHAQUE ANNÉE.

Pour la saison à venir, quasiment tous les fabricants ont réagi, soit en proposant sous leur bannière des produits provenant de concurrent­s, soit en proposant leur propre solution, une stratégie coûteuse qui n’a de sens que si la marque apporte une vraie nouveauté avec une solution originale. Résultat, si dans le monde binaire qui opposait les fixations à inserts – cantonnées à la randonnée puisque condamnées à ne s’associer qu’avec des chaussures elles-mêmes équipées de l’autre moitié du système – à celles alpines, aussi fixes que les pyramides et sans concurrenc­e pour les skieurs, la vérité d’aujourd’hui s’est grandement complexifi­ée – comme cette phrase ! – une multitude de combinaiso­ns pouvant s’imaginer. Bref, vos attentes forcément uniques ont maintenant une réponse à la carte. Le problème demeure néanmoins que le montant à investir impose de ne pas trop se tromper, d’autant que selon le package choisi, vous changez d’un coup skis, fixations et chaussures ! Ça fait mal…

QUELLES OPTIONS?

La polyvalenc­e a deux grandes chapelles : les fixations alpines débrayable­s et celles à inserts, chacune subdivisée en deux familles. Pour les premières, on peut hésiter entre les fixations débrayable­s « rigides » et celles « légères »

alors que pour les secondes, on balance entre les fixations à inserts à sécurité ou à sécurité limitée. Évidemment, l’option inserts impose d’acheter des chaussures adaptées… Question poids, les minimalist­es oscillent autour de 700 g la paire alors que les typées ski s’affichent grosso modo entre 2 000 à 3000 g, une différence de poids que l’on peut comparer à celle que l’on trouve entre les chaussures de trail et celles de randonnée. Mieux, les fixations à inserts offrent en position montée un axe de rotation idéal pour le déroulé de la marche, sans aucun poids mort sur la talonnière : la masse reste fixée sur le ski (que l’on pousse sur la neige en marchant) alors que les fixations débrayable­s augmentent la masse en rotation et imposent de se muscler les mollets, le poids étant en partie traîné par le talon… Bref, le tableau idyllique dépeint ici devrait imposer le choix des fixations à inserts comme celui du bon sens. La vérité s’avère plus subtile : en matière de sécurité, les fixations à inserts ont des progrès à faire ayant des valeurs de réglage montant jusqu’à 12 maximum. Mais si cette valeur suffit à la majorité des skieurs, elle n’est pas l’identique d’une valeur normée DIN, ni aussi stable : selon les vibrations et la déformatio­n du ski, la chaussure peut quitter son emplacemen­t d’où la propension de certains à bloquer les fixations, quitte à se mettre en danger. C’est tout l’enjeu des nouveaux modèles comme la Beast de Dynafit, bien plus lourde que les produits originaux mais au DIN réglable, de la Trab TR2 au périmètre restreint puisque dédiée aux Scarpa Spirit actuelleme­nt, ou la très attendue Vipec 12 de Diamir (ex-Zenith 12 en présentati­on puis Safety Pin Tec).

OBJECTIF SÉCURITÉ

Si les adeptes des fixations à inserts sont nombreux, ils restent une « élite » capable d’assumer cette faiblesse en matière de sécurité, les secouriste­s notant un net emballemen­t de graves blessures au genou en randonnée. D’ailleurs, si ce n’était pas un frein à l’élargissem­ent de la base d’utilisateu­rs, les fabricants ne se donneraien­t pas autant de mal pour développer ces nouveaux produits au seuil de déclenchem­ent progressif. Mais à 800 euros le bout, Dynafit va toucher la cible hyper élitiste des skieurs qui veulent envoyer du pâté en améliorant leur sécurité, autant dire pas le grand public. Gageons qu’il s’agit là de l’avant-garde éclairée permettant dans quelques années de faire baisser les prix de production… Avec sa Vipec 12, le fabricant suisse Diamir marque son grand retour sur la scène de la randonnée, du moins si le produit correspond bien à la promesse vendue : fixation à inserts au DIN réglable et normée de 1200 grammes la paire, disponible en janvier sur le marché français contre 439 ou 449 euros selon la largeur du frein ski. De quoi faire réfléchir les adeptes du lourd, même si les fixations débrayable­s ont encore un avenir chez ceux qui n’ont pas prévu de se convertir à la rando pure mais comptent bien pouvoir en profiter quand même, autant dire la masse. Globalemen­t, deux interpréta­tions d’un même système s’affrontent pour les adeptes des butées et autres talonnière­s : les structures tubulaires type Tyrolia AAAmbition 12 ou Fischer Ambition 12, Diamir Freeride Pro ou Eagle 12, et les produits plus alpins, souvent plus près du sol mais toujours plus lourds, type Salomon Guardian, Marker Tour FR ou Duke, et Tyrolia AAAdrenali­ne. Généraleme­nt, les fixations tubulaires sont choisies par les randonneur­s qui ne rechignent pas à skier sur piste, sans être de grands technicien­s du fait du léger manque de rigidité de l’ensemble alors que celles plus alpines, dotées d’une plaque solidarisa­nt la butée de la talonnière, permettent de ne rien changer à votre manière de skier mais limitent vos ambitions à la montée, le poids entraîné à chaque pas entamant rapidement les réserves d’énergie et ralentissa­nt la cadence. En fait, il s’agit là d’un pur matériel de freerando et pas du tout d’un équipement de randonnée. Monter un peu pour descendre beaucoup ou monter un peu pour aller là où les autres ne vont pas (trop), voilà l’esprit de la pratique et de ce matériel.

JUSQU’OÙ ALLÉGER LES SKIS?

La tendance est clairement à l’allégement des skis. Après avoir longtemps cherché à développer des skis en béton, capables d’encaisser les plus gros sauts de barre, les fabricants ont changé de paradigme et mis sur le marché des skis plus ludiques et donc, moins armés au niveau de l’empilement

des matériaux les constituan­t, ce qu’on appelle classiquem­ent le sandwich. Les skis de freeride étaient des « armes », ils sont devenus des « jouets ». Moins de plaques de Titanal ou des plaques moins épaisses, et c’est des centaines de grammes qui s’envolent, mais jusqu’où ne pas aller trop loin à ce jeu ? Sans aborder les skis de compétitio­n de ski alpinisme, qu’un coup de vent peut balayer comme un fétu de paille, (jusqu’à 750 grammes par ski nu !), ni même les purs skis de rando à 2500 grammes la paire, on peut raisonnabl­ement s’intéresser aux skis flirtant avec les 3 kg, un peu plus ou un peu moins selon la largeur (de 90 à 120 mm) et la longueur (entre 170 et 180 cm). À titre d’exemple, chez les gros bébés, une paire de Dynastar HM107 en 184 cm pèse 3868 grammes alors qu’un Black Diamond Carbon Megawatt (120 mm sous le pied) va chercher dans les 3200 grammes en 178 cm, sachant qu’à partir de 95 mm au patin, les fixations type Low-tec sont globalemen­t déconseill­ées, du moins sur les modèles aux embases étroites (aux vis rapprochée­s) qui travaillen­t à l’arrachemen­t. La casse du ski est de moins en moins souvent prise en charge en SAV du fabricant, encore moins chez celui de la fixation. Du coup, les magasins commencent à faire signer des décharges de responsabi­lité lorsqu’ils effectuent ce type de montage… Bref, à monter en connaissan­ce de cause.

SAVOIR RAISON GARDER

Dans le polyvalent, un Black Diamond Revert (95 mm au patin), propose 3 100 grammes la paire en 180 cm, un poids que l’on peut qualifier de médian entre le désir de légèreté et celui de stabilité ou de solidité. C’est un peu notre référence pour ce sujet destiné à des lecteurs qui ont plutôt l’habitude du « un peu plus lourd » que l’inverse, cas particulie­rs mis à part… Cet exposé un poil laborieux (ça monte ou quoi ?) montre néanmoins que l’on peut trouver des skis modernes, dotés de rocker et d’une certaine surface, deux paramètres obligatoir­es dans votre choix, affichant un poids correct. Certes, ce n’est pas la panacée à la montée vu sous le prisme de la performanc­e, mais l’essentiel demeure que le combo « plaisir montée-descente » soit positif, inoubliabl­e si possible. Car la course au poids, si elle peut se comprendre

« MÊME AVEC DES AVANCÉES TECHNOLOGI­QUES NOTABLES, IL FAUT GARDER VOTRE RAISON ET AVANT TOUT CIBLER VOS BESOINS.»

chez les compétiteu­rs, n’a que peu de sens chez l’amateur émerveillé pour peu qu’il soit resté dans la moyenne évoquée plus haut. Gagner un kilo supplément­aire sur l’ensemble « skis-fixations » impose de gros sacrifices en plaisir alors que l’économiser sur une raclette, tartiflett­e, fondue savoyarde (voire les trois !) l’est beaucoup plus. Les skis délaminés, pliés en deux au niveau de la butée ou cassés au niveau du talon sur une réception de saut un peu dure ou un peu posée à cul, cela n’arrive pas qu’aux autres. Les SAV des marques en savent quelque chose mais sachez que, si les produits sont le plus souvent remplacés, ce n’est pas systématiq­ue et encore moins la règle, la difficulté étant de pouvoir démontrer que l’usage qui a été fait du ski demeurait bien dans son cahier des charges. Plus le ski est allégé, moins vous pourrez exiger une garantie car ces produits exigent de l’attention et une certaine maîtrise : exclusif par leur poids, exclusif dans leur usage. La chasse au gramme à tout prix risque de vous amener dans une impasse à moins que vous ne maîtrisiez déjà le sujet, que la rando fasse déjà pleinement partie de votre répertoire. Même avec des avancées technologi­ques notables, comme un net progrès dans la maîtrise du carbone pour le ski (Black Diamond, Völkl, DPS), ou les structures allégées que l’on trouve chez Rossignol (Air Tip), Movement (XSeries, technologi­e North TBT) ou Zag (technologi­e Nano) pour ne citer qu’eux, il faut garder votre raison et avant tout cibler vos besoins. Vu les efforts fournis par les fabricants de skis et de fixations, tout perdre à vouloir trop gagner serait une erreur impardonna­ble.

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