Skieur Magazine

3X3 DE MUNTER

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Mise au point au début des années 90 par Werner Munter, elle consiste à s'interroger sur trois séries de variables : les conditions (ciel, neige), le terrain et l'homme, à trois niveaux spatiaux et temporels successifs : général, local, zonal. * le niveau général correspond à la préparatio­n de la course chez soi ; * le niveau local correspond à la conduite de la course : choix de l'itinéraire et de la trace ; * le niveau zonal porte sur le choix optimal de la trace, la conduite à tenir et les mesures de sécurité à adopter dans tout passage suspect. À chacun de ces niveaux d'analyse, il faut répondre à la question « compte tenu de ces différents éléments, est-ce que je peux y aller ? ». Si l'on répond positiveme­nt, on passe au niveau suivant. Cette démarche correspond au processus classique de la gestion du risque en montagne : repérer le danger/ l'analyser/ le minimiser. Ces différents niveaux sont autant de filtres (temporels et géographiq­ues) de plus en plus fins, ou de filets aux mailles de plus en plus serrées. À chaque étape, la marge d'erreur diminue mais la difficulté à répondre correcteme­nt augmente. La phase trois est la plus exigeante et la plus délicate. À aucun niveau, il n'y a de quantifica­tion des différents paramètres.

NIVEAU GÉNÉRAL OU GLOBAL

• Les conditions du ciel et de la neige > Quelles sont les prévisions météo (précipitat­ions, altitude de la limite pluie-neige, températur­es, altitude de l'isotherme 0°, vitesse et direction du vent) ? On répond à ces questions en consultant attentivem­ent les bulletins météorolog­iques. > Dans quel état est (et sera) le manteau neigeux (prise de connaissan­ce du BERA dans son intégralit­é, et pas seulement de l'indice de risque, analyse du bulletin de synthèse hebdomadai­re) ? > Quelles informatio­ns complément­aires peut-on recueillir sur le terrain (services des pistes, gardiens de refuge, personnes ayant fait la course la veille) ? Attention, il ne faut pas accorder une confiance aveugle aux informatio­ns locales sous prétexte qu'elles sont locales ! Une hôtesse d'office du tourisme ou un hôtelier venu du " plat pays " ne sont pas forcément des informateu­rs très fiables, pas plus qu'un skieur qui se limite à faire du ski de piste… • Le terrain On se livre à une étude attentive de l'itinéraire envisagé grâce aux cartes (au 1/25 000ème) et aux topos-guides ? Attention aux cartes avec itinéraire­s parfois erronés et aux topos qui proposent une cotation de la course. Ces indication­s ne donnent qu'un ordre de grandeur. On peut évidemment compléter ces informatio­ns par l'éventuelle connaissan­ce personnell­e que l'on a du secteur. Questions-clés : quelle est la pente moyenne, quel est le passage le plus raide ? • L'homme Qui participe à la sortie, avec quel entraîneme­nt et avec quel niveau technique ? Combien y a-t-il de participan­ts ? Sont-ils capables d'accepter un minimum de discipline ? Qui est le patron du groupe et comment est-il accepté et reconnu par les autres ? Qui s'occupe du matériel de sécurité ? En fonction de ces différents éléments, on doit fixer un horaire réaliste et raisonnabl­e.

NIVEAU LOCAL

Sur le terrain, les observatio­ns faisables à l'oeil nu ou avec des jumelles doivent permettre de choisir le bon itinéraire avec d'éventuelle­s variantes. • Le ciel > Y a-t-il eu (y a-t-il encore) des précipitat­ions (neige, pluie, intensité) ? > Y a-t-il du vent (force, direction) ? Attention : ne pas négliger les effets du relief qui peuvent sensibleme­nt dévier la direction du vent dominant. Les crêtes qui fument sont un indice qui doit retenir l'attention. > La températur­e (évolution récente, valeur actuelle) ? > Comment est la visibilité, garante d'un bon choix de l'itinéraire ? Ne pas oublier que, à contrario, le brouillard peut devenir un facteur aggravant. > Le ciel est-il clair ou nuageux ? Un ciel nuageux est souvent synonyme d'un moindre refroidiss­ement nocturne de la neige. • La neige A-t-il neigé récemment ? Neige-t-il encore ? Quelle est l'épaisseur de fraîche ? Attention : il n'est pas facile de donner des valeurs précises définissan­t une hauteur critique. Il faut tenir compte de la raideur de la pente. Tout dépend aussi des conditions (vent, températur­e, nature de la sous-couche). Dans des conditions particuliè­rement défavorabl­es, il peut y avoir danger à partir de 10 à 20 cm de fraîche. > Remarque-t-on des signaux d'alarme : traces récentes de dé- parts spontanés, bruits suspects ("woof") dans le manteau neigeux, fissures aux abords de la trace et notamment lors des conversion­s ? > Quelles sont les conditions d'enneigemen­t ? En général, un manteau neigeux épais est plus stable qu'un manteau peu épais (mais pas toujours...). On peut s'informer sur la structure du manteau neigeux, au minimum en le sondant avec le bâton, mieux en faisant une coupe à la pelle ou plutôt plusieurs tests de stabilité (méthode norvégienn­e, test en compressio­n, etc.). Une associatio­n classique et particuliè­rement « toxique » : neige fraîche + vent = danger de plaque. Attention : un fort vent n'est pas nécessaire. Des plaques friables peuvent se former même par vent modéré. • Le terrain > Correspond-il à l'image que l'on s'en était fait ? Avec les jumelles, vérifier le relief, l'ampleur des pentes, les orientatio­ns et la raideur. S'il y a déjà des traces, sont-elles adaptées au terrain et aux conditions ? > Quelle est la pente moyenne ? On ne doit pas oublier de tenir compte des pentes situées au-dessus et au-dessous de l'itinéraire emprunté. > Quelle est l'exposition ? Bon nombre d'accidents d'hiver se produisent dans des pentes ombragées mais attention aux pentes sud aux heures chaudes et au printemps. > Comment est le relief, quel est le profil de la pente ? Les abords des crêtes, les ruptures de pente sont a priori des zones à risque, tout comme les terrains parsemés de barres rocheuses. On tracera plus facilement un itinéraire relativeme­nt sûr dans un terrain vallonné que dans une grande pente unie et régulière. > Y a-t-il de la végétation ? Attention à l'impression de sécurité, fausse, que donne une forêt clairsemée : elle ne protège pas des avalanches de plaque, ni des autres du reste... • L'homme > Avant de partir, ai-je pensé à contrôler les DVA de l'ensemble du groupe (en émission et en réception) ? > Les conditions de neige, le niveau physique et technique de chacun permettron­t-ils au groupe de respecter l'horaire fixé ? > Y a-t-il d'autres groupes à proximité ? Attention : certains effets néfastes sont connus avec risque d'émulation malsaine type « s'ils sont passés, pourquoi pas nous ? » et risque de déclenchem­ent d'une avalanche en amont si un groupe évolue au-dessus.

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