Le ski dans le viseur
Ça n’est plus de la paranoïa hélas, c’est devenu une certitude : le monde médiatiquo-politique a désormais un a priori négatif sur le ski de piste. Pas celui qui fait résonner la Marseillaise et pas davantage celui socialement et idéologiquement acceptable, le ski de rando, bien sous tous rapports car « déconstruit » des remontées mécaniques, non, ce lobby politico-médiatique regarde de travers le ski que tout le monde pratique en station, ce bon vieux ski alpin. Pourtant, ce début de « skibashing » se trouve en totale opposition avec la réalité du terrain, déconnecté du plaisir qu’on eut des millions de Français sur les domaines skiables cette saison. Alors pourquoi ces millions de sourires sur neige damée gênent-ils donc ? Parce qu’à force de rabâcher des mensonges, cela infuse dans la société. À force d’entendre que c’est très mal la neige de culture, le ski devient suspect. À force de relayer bêtement le moindre appel à manifester contre chaque retenue d’altitude (dont plus aucune n’est autorisée si elle est à usage unique), on risque de se retrouver devant une impasse : la montagne doit s’adapter au réchauffement climatique tellement sensible en altitude mais qu’est-ce la neige de culture si ce n’est cette adaptation justement ? Le matériel de ski, présenté dans ce numéro Pro, est intimement lié à son écosystème les domaines skiables. Il n’est donc pas hors sujet de mêler les deux sujets qui n’en font qu’un. Il se trouve qu’en lisant le Figaro (pas reporterre ou Libération), un quotidien où l’écriture inclusive est encore bannie et dont les pages saumon sont dédiées à l’économie et à la finance, bref, pas un journal intégriste de l’écologie politique, je trébuche sur un article sur les Jeux Olympiques intitulé : Pékin 2 022 des JO d’hiver avec 100 % de neige artificielle, une triste première. Intéressé, je poursuis ma lecture. On y parle de « fausse neige », on admet que la rigueur du climat local fera que cette fausse neige ne fondra pas avant la belle saison, mais on déplore qu’il ait fallu 185 millions de litres d’eau (qui seront rendus à la nature au printemps), pour enneiger le site olympique. Bon, une piscine olympique, c’est environ 3 millions de litres d’eau dans lesquels on met de la Javel… 60 piscines olympiques, et c’est pareil en pire ! Bref, cet article pleurniche un peu, laissant à croire que le ski, avec ses canons à neige, c’est vraiment une catastrophe écologique. Quelques jours plus tard, je tombe sur un article dithyrambique sur le nouveau centre d’entraînement XXL du PSG avec pelouses chauffées, équipements luxueux, projet pharaonique de 300 millions d’euros avec une emprise au sol de 74 hectares. Je m’intéresse jusqu’à la dernière ligne : pas une critique, rien, pas même un commentaire sur les pelouses chauffées. Pourtant, c’est le même journaliste qui a signé ces deux articles ! Comment ne pas en déduire que le regard porté sur le ski est différent du reste ? Comment faire comprendre à ce type de journalistes que cracher de l’eau par température négative pour faire de la neige pollue moins que de déneiger et saler les routes l’hiver ? Que chauffer des pelouses de foot ne relève pas vraiment de la transition écologique non plus ? Alors pourquoi cette forme d’acharnement contre le ski de piste que les Français plébiscitent ? Simplement parce que ce bruit médiatiquo-politique l’emporte peu à peu sur le bon sens. Et c’est bien dommage car un jour il sera trop tard pour le déplorer. Ce jour-là, il ne sera plus utile de relayer les nouveautés des fabricants de skis puisque ne restera que la randonnée, et encore, si on ne nous interdit pas de skier tout court en montagne. Le parc national des Calanques a bien déjà commencé à réglementer l’escalade en interdisant certains secteurs voire l’accès à certains professionnels, bref, à restreindre la liberté de grimper dans un massif historique de l’alpinisme, là où Gaston Rébuffat avait fait ses premières armes. Le pire n’est jamais certain, mais jamais impossible…