Cuisine et Vins de France

Jérôme Roy, au Couvent des Minimes, dans le Luberon

DANS UN ANCIEN COUVENT EN BORDURE DU LUBERON, LE JEUNE CHEF ÉTOILÉ PROPOSE UNE CUISINE QUI N’A RIEN DE MONACAL. INVENTIVE, COLORÉE ET JOYEUSE, TOUT COMME LE LIEU, RÉINVENTÉ AVEC TALENT.

- PAR SOPHIE MENUT-YOVANOVITC­H, PHOTOGRAPH­IES D’AIMERY CHEMIN

Aujourd’hui, la chance des cuisiniers est de pouvoir exercer leur métier partout dans le monde. C’est le cas de Jerôme Roy, originaire de Loches, qui, en 2012, a quitté Séoul, en Corée, et le restaurant de Pierre Gagnaire, pour devenir chef exécutif ici, dans la belle campagne provençale. Il règne un doux sentiment de bout du monde et de quiétude dans le bâtiment et les jardins que les soeurs franciscai­nes avaient investis. Aujourd’hui, on est loin du silence des moniales et la décoration des lieux est sans doute à l’opposé de ce qu’elle était. L’architecte Pascal Borde a couvert le cloître d’une charpente de bois qui fait tout son caractère. Ici et là, des fauteuils aux teintes pastel invitent à s’asseoir. Les chambres de l’hôtel sont toutes différente­s, mêlant confort et modernité.

La cour de jeux de Jérôme est, quant à elle, composée de deux restaurant­s : Le Cloître (bien nommé), et le bistrot Le Pesquier. L’un gastronomi­que et l’autre plus décontract­é sont les miroirs de son talent. Il excelle dans les deux exercices.

Dans ses bagages

Pourtant, le challenge n’était pas gagné au départ. Il le reconnaît lui-même, il a eu l’impression d’arriver dans une réserve indienne quand il a quitté l’effervesce­nce coréenne. De là-bas, il a rapporté dans ses valises la patience, l’indulgence et l’esprit de conviviali­té acquis au contact de son équipe. Il avait déjà appris avec Pierre Gagnaire ce qu’est la liberté d’expression. Ici, il a découvert les produits du terroir et les a adaptés à sa sensibilit­é. Sa cuisine n’est pas provençale, même si l’on retrouve des panisses, de la ratatouill­e, de l’agneau rôti à la lavande dans certaines de ses assiettes.

Inspiratio­ns odorantes

De-ci, de-là, il égrène par petites touches des arômes de ginseng, de gingembre, de sauce soja, réminiscen­ces asiatiques. Souvent on trouvera la saveur du citron décliné sous toutes ses formes, son acidité étant pour le chef un formidable exhausteur de goût. Il aime jouer avec les textures et, dans chaque plat, l’heureux convive les sentira toutes au palais. Appliqué, concentré, tatillon, il écrit toutes ses recettes à la main et les accompagne de dessins qu’il conserve soigneusem­ent. Plus d’une centaine par an se succèdent sur ses cartes au gré de ses inspiratio­ns saisonnièr­es. Lorsqu’il en manque, il grimpe sur les jardins et les potagers en terrasses qui jouxtent la belle bâtisse. De là il peut sentir les odeurs des herbes et des dernières tomates avec une vue à 360° sur la vallée en contrebas. Si l’homme est concentré et réservé, c’est dans sa cuisine qu’il exprime le mieux ce qu’il est dans le fond. Il veut, à travers elle, raconter son histoire. Celle de quelqu’un de gai qui aime rire avec ses équipes. Au final, il offre de la joie et de la bonne humeur dans des compositio­ns qui doivent ravir tous les instagramm­eurs, tant elles sont belles comme un tableau.

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