LA MÉDITATION CHANGE LA VIE, DES GRANDS ET DES PETITS !
Psychologue clinicienne et fondatrice des centres Cogito’z), Jeanne Siaud-facchin enseigne la méditation de Pleine Conscience à Paris et à Marseille. Elle a développé les programmes Mindful Up destinés aux enfants et aux adolescents. L’entraînement à la
Rencontre avec la créatrice d'un programme de méditation pour les jeunes
esprit Yoga : Comment la méditation a changé ma vie… est le titre d’un de vos livres. Pourriez-vous nous l’expliquer en quelques mots ?
Jeanne Siaud-facchin : J’ai rencontré la méditation par hasard. J’étais partie aux Philippines pour rencontrer des thérapeutes qui travaillaient avec des enfants en grande difficulté. Il y avait avec moi une vingtaine de psys et mon mari, qui avait prévu de faire du tourisme. Or l’organisateur n’avait visiblement pas compris l’objet du voyage et notre groupe s’est retrouvé dans une pièce climatisée, assis, les yeux fermés, à méditer, sans avoir reçu d’autre consigne que de clore nos paupières. Pendant huit jours, de l’aube au crépuscule, les 23 thérapeutes que nous étions sommes restés assis, en silence, à méditer. Au bout de quelques jours, je me suis assise sur un banc avec mon mari et, tandis que nous sommes mariés depuis 30 ans, nous nous sommes regardés comme si nous venions de nous rencontrer. J’ai eu la sensation de voir pour la première fois le monde en couleur, mes sensations étaient différentes, les autres me semblaient différents… De retour en France, j’ai fait plusieurs formations, stages, retraites… Cela a changé ma vie !
e.y. : Est-ce que cela a aussi changé votre façon de travailler ?
J. S.-F. : Oui, bien sûr. Cela a notamment changé ma posture. J’ai toujours été très engagée auprès de mes patients, cela a renforcé mes qualités de présence et d’ouverture. Je me sens plus en lien avec mes ressentis, comme si mon corps et mon coeur étaient en expansion. Puis j’ai
Avec la méditation, les enfants découvrent qu’ils ont un paysage intérieur.
cherché comment transformer mes connaissances et mes compétences pour les enfants et les adolescents. J’ai introduit des éléments de la psychologie positive – que j’appelle psychologie des ressources – de manière à leur permettre d’accéder à leurs qualités, à leurs valeurs. C’est ainsi que j’ai créé les programmes Mindful Up, à une époque où il n’existait pas de programme pour les enfants.
e.y. : Pourquoi la méditation est-elle intéressante pour les enfants ?
J. S.-F. : Avec la méditation, les enfants découvrent qu’ils ont un paysage intérieur ! Cela leur permet de se relier profondément à leurs ressources. La méditation leur permet de se sentir clairs dans leur tête. Or, pour apprendre ou restituer, il est nécessaire d’avoir de l’espace dans la tête. Certaines séances leur permettent de conscientiser leurs qualités : cela les grise et a des effets positifs sur l’estime de soi, la confiance en soi.
e.y. : Et pour les ados ?
J. S.-F. : En général, les adolescents ne veulent pas entendre parler d’un programme de méditation. On leur parle plutôt de programme d’entraînement de l’attention en leur expliquant que ce programme permet de mieux se connaître, de mieux se comprendre. Et cela les intéresse beaucoup de devenir « experts d’euxmêmes », d’apprendre à penser de manière autonome, de comprendre les mécanismes de l’attention, le fonctionnement des émotions.
e.y. : Lorsque les adultes pratiquent la pleine conscience, ontils plus de facilité à aller vers une éducation bienveillante ?
J. S.-F. : Quand on s’énerve, c’est que l’on est sous l’emprise de nos émotions : on n’est pas libre. Si vous êtes entraîné à la pleine conscience, vous pouvez alors saisir le message des émotions qui émerge d’abord dans le corps, puis dans le champ de la conscience avant qu’il ne se transforme en réaction. L’entraînement à la méditation nous permet de toucher notre profonde humilité, notre profonde humanité. Nous développons l’auto-compassion et, du même coup, la compassion pour les autres. Quand on touche cette fragilité intrinsèque, ça ré-ouvre un immense champ de conscience. Beaucoup de parents expriment combien cette pratique a modifié leur vie familiale et leurs relations avec les enfants.
e.y. : Faut-il beaucoup pratiquer pour cela ?
J.S.-F. : La méditation n’est pas une activité en plus, comme la gymnastique par exemple. Il ne faut pas se dire qu’on doit se lever à 5 h du matin pour s’asseoir sur un banc inconfortable. Plus on pratique dans des conditions proches de notre propre vie, plus cela sera facile d’appliquer dans différents domaines de nos vies et donc avec nos enfants et adolescents.
e.y. : Quels conseils pratiques donneriez-vous ?
J.S.-F. : Personnellement, je ne passe pas une journée sans consulter au moins 2 ou 3 fois ma « météo intérieure ». Et je pratique l’exercice Stop - Feel - Go, l’équivalent pleine conscience de « tourner sept fois sa langue dans sa bouche ». Stop : on s’arrête dans sa tête, dans ses actes, dans ses questions… Feel : on ressent ce qui se passe dans son corps, les sensations et les émotions. Go : maintenant, il m’est possible d’agir, de répondre, de décider puisque j’ai pris conscience de la situation, des émotions, de l’environnement. C’est pour moi le fondement de la conscience à soimême, praticable de 7 à 77 ans et au-delà !