Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
Les élus de L'ETT peuvent diligenter une expertise dans l'entreprise utilisatrice
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Mettant cependant l'accent sur la prévention, la Cour de cassation a censuré l'ordonnance et admis que le CHSCT (CSE) d'une ETT puisse désigner un expert lorsque deux conditions sont remplies (cass. soc. 26 février 2020, n° 18-22556 FSPBRI) :
- il doit s'agir d'une expertise pour risque grave ; la solution ne concerne pas l'expertise en cas de projet important modifiant les conditions de travail ;
- l'entreprise utilisatrice doit avoir manqué à sa mission de surveillance et de protection ainsi que le CSE de cette dernière.
En cas de litige, le juge doit vérifier ces conditions. Et l'entreprise utilisatrice doit être mise en cause, puisque l'expertise va se dérouler dans ses locaux, une situation pour le moins originale. Pour justifier la solution, la Cour de cassation s'est fondée sur un visa pléthorique, allant d'un droit constitutionnel au code du travail en passant par deux directives et la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne. Il résulte du code du travail que la responsabilité incombe à l'entreprise utilisatrice. Il résulte ensuite des deux directives (89/391 et 91/383 du 25 juin 1991 sur le droit à la santé des salariés précaires) qu'elle est commune aux deux entreprises, tout en reposant au premier chef sur l'entreprise utilisatrice. Bien que la première directive n'aborde pas le droit à expertise, la chambre sociale a déduit ce droit implicitement. La possibilité pour le CSE de L'ETT de désigner un expert est également justifiée par l'exigence constitutionnelle du droit à la santé des travailleurs.
Entre le droit de propriété et le droit à la santé, la balance a penché en faveur de ce dernier. Ainsi, même en présence d'un texte clair dans le code du travail, la solution peut être tout autre sur le fondement d'un droit constitutionnel énoncé en termes généraux.