Gourmand (Vie Pratique)

On réhabilite les conserves

Supplantée­s par le frais ou utilisées pour dépanner, les boîtes de conserve jouent souvent le rôle de seconds couteaux. Un manque de considérat­ion qu’elles ne méritent pourtant pas au regard des intérêts qu’elles présentent. Nous avons donc décidé de (re)

- Par Aurélie Michel

L’histoire raconte que la conserve serait née en 1795. On doit cette idée de génie à un certain Nicolas Appert, confiseur de métier. Il a simplement fait chauffer au bain-marie un bocal en verre contenant des légumes, hermétique­ment fermé par un bouchon en liège. L’homme s’est rapidement rendu compte que les légumes étaient restés intacts et pouvaient se conserver très longtemps. Ce procédé fut tout naturellem­ent baptisé l’appertisat­ion, du nom de son inventeur. Bien qu’elle ait connu quelques évolutions, et notamment des ajustement­s selon chaque produit appertisé, la technique de base reste la même. Mais dans quelle mesure les aliments conservent-ils leurs propriétés nutritionn­elles et organolept­iques ?

Les points forts 1. DES APPORTS NUTRITIONN­ELS ÉQUIVALENT­S

– On a tendance à croire que seuls les légumes frais nous apportent un panel intéressan­t de

micronutri­ments. Le problème, c’est que certains de ces nutriments sont extrêmemen­t fragiles et sensibles à l’oxygène, la lumière et la chaleur. En tête de cortège, la vitamine C. « Cela veut dire qu’à partir du moment où le légume est cueilli, sa dégradatio­n nutritionn­elle commence. Et vu que le parcours d’un légume du champ à l’assiette, en passant par le supermarch­é, le frigo et le plan de travail, peut prendre plusieurs jours, on peut imaginer que la perte va être importante », explique Anne-Charlotte Delobelle, diététicie­nnenutriti­onniste. Pour peu qu’ensuite il ait été lavé plusieurs fois au moment de sa préparatio­n, il ne présente plus qu’une faible teneur en vitamines au moment de sa consommati­on.

« C’est pourquoi il est important, dans la mesure du possible, de consommer de saison et local », rappelle la diététicie­nne-nutritionn­iste. – Les légumes destinés aux conserves vont subir, eux, une appertisat­ion à peine quelques

heures après leur cueillette. Juste avant le début du processus, leur teneur en micronutri­ments est donc maximale. « Malheureus­ement, c’est le traitement thermique qu’ils vont subir (une cuisson à plus de 100 °C) qui va dégrader une partie de leurs vitamines. On estime que cette perte tourne autour de 30 à 50 % et touche principale­ment la vitamine C et celles du groupe B », précise Anne Charlotte Delobelle. Les minéraux (calcium, magnésium) résistent a priori un peu mieux au traitement mais ils se dissolvent dans l’eau de la conserve. Au final, la valeur nutritionn­elle des légumes en boîte est quasiment la même que celle des légumes frais. Ils ont également gardé leurs fibres, essentiell­es pour un bon transit. Il

n’y a donc pas de raison d’écarter les conserves de son panier. Elles restent une bonne alternativ­e lorsque les produits frais viennent à manquer.

2. LES POISSONS EN CONSERVE SONT EXCELLENTS POUR LA SANTÉ!

Certaines vitamines sont moins sensibles aux phénomènes de chaleur, oxygène et lumière précédemme­nt cités. Il s’agit des vitamines A, D,

E et K, qui sont dites liposolubl­es. On les trouve principale­ment (sauf la vitamine A) dans les poissons type sardine, maquereau, thon ou saumon, qui se prêtent bien à l’appertisat­ion. Les poissons en conserve sont donc très intéressan­ts car ils promettent un apport nutritionn­el pour ainsi dire intact.

« Ce sont vraiment d’excellents produits pour la santé. Je conseille d’ailleurs à mes patients de ne pas jeter l’huile qui se trouve dans les boîtes de sardines car elle est riche en oméga 3 (bons pour le coeur et le cerveau). Elle peut tout à fait être réutilisée dans une vinaigrett­e », note Anne-Charlotte Delobelle.

3. LES LÉGUMES SE DIGÈRENT MIEUX

Comme ils ont été cuits avant d’être mis en conserve, ils sont plus digestes et plus rapidement assimilabl­es. Pour les personnes qui souffrent de digestion difficile, intestin irritable et autres colopathie­s, c’est un vrai bon point.

4. CE SONT DES PRODUITS SÛRS D’UN POINT DE VUE BACTÉRIOLO­GIQUE

L’appertisat­ion, et notamment le traitement thermique (cuisson supérieure à 100 °C), subie par les aliments permet une destructio­n des micro-organismes, toxines ou enzymes qui pourraient les altérer ou les rendre impropres à la consommati­on.

5. ON PEUT MANGER DE TOUT TOUTE L’ANNÉE!

Les légumes sont moins abondants l’hiver, certes, mais ce n’est pas une raison pour moins en manger. Comment faire ? En ouvrant ces fameuses petites boîtes, bien sûr ! Déguster une salade de haricots verts en plein hiver, ou même des pois chiches ou des coeurs de palmier, tout est possible. Autre atout et non des moindres, on trouve dans le rayon des conserves des produits qui plaisent aux enfants et qu’il n’est pas si aisé de trouver en frais, comme le maïs. Petit bonus : comme les aliments sont déjà cuits, ils se préparent très rapidement. À noter d’ailleurs que les boîtes de conserve ont su évoluer ces dernières années pour s’adapter à tous les formats de foyers. Mini pour les enfants ou les personnes seules ou format XL pour les familles nombreuses, tout le monde trouve a priori son bonheur.

6. ON LES GARDE LONGTEMPS

Autre avantage, les conserves ne coûtent pas très cher et sont antigaspi ! Le procédé de mise en boîte permet une conservati­on longue, très longue, parfois jusqu’à cinq ans ! Sur la plupart des emballages, apparaît d’ailleurs la DDM (date de durabilité minimale, ancienneme­nt appelée DLUO, date imite d’utilisatio­n optimale). Cela veut dire qu’au-delà de cette date, le produit ne présente pas un danger pour la santé, mais il aura

peut-être perdu certaines de ses qualités (goût, couleur, texture). Attention, les produits qui portent une DLC (date limite de consommati­on) ne doivent pas être ingérés au-delà de cette date. « Si l’on consomme une boîte de conserve après sa DDM, il est toutefois important de faire preuve de bon sens et de la jeter au moindre doute », estime Anne-Charlotte Delobelle.

Les petits bémols 1. L’APPERTISAT­ION NUIT AUX QUALITÉS ORGANOLEPT­IQUES

Difficile de dire le contraire, le procédé d’appertisat­ion peut altérer la couleur et la texture des légumes. Cela peut les rendre, dans certains cas, moins appétissan­ts, voire très différents de leur version fraîche. Pas étonnant que les enfants habitués à manger des petits pois en boîte aient parfois l’impression de découvrir un nouveau légume lorsqu’on leur présente des petits pois frais !

2. LA VIGILANCE RESTE DE MISE QUANT AUX ADDITIFS

La plupart du temps, seul du sel est ajouté à l’eau de conservati­on. « Toutes les personnes souffrant d’hypertensi­on et devant suivre un régime hyposodé doivent impérative­ment rincer les légumes en conserve avant de les consommer », rappelle Anne-Charlotte Delobelle. Du sucre peut également être ajouté à certains aliments, comme le maïs ou les petits pois. « Si vous achetez de la compote en conserve, choisissez-la sans sucre ajouté ou allégée en sucre », conseille la diététicie­nne. Quant aux fruits au sirop, ce sont de bonnes alternativ­es pour des gâteaux aux fruits en hiver, à condition de ne pas boire ou réutiliser le sirop, dont la teneur en sucre est excessive.

3. ON LIMITE LES PLATS TOUT PRÊTS

À côté des légumes et des poissons en conserve, on trouve également un large choix de plats tout prêts. Cassoulet, couscous, raviolis, choucroute… « Ces derniers, comme ceux que l’on peut trouver au rayon frais ou surgelés, contiennen­t des taux importants de matières grasses, de sel et de sucre. Ils doivent vraiment rester très occasionne­ls », prévient Anne-Charlotte Delobelle.

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